Le pouvoir de l’impossible
Et si l’impossible existait pour être remis en question ? Les idées et les projets impossibles nous poussent au-delà de nos limites habituelles. L’impossible est une invitation au voyage ; il nous sort de notre zone de confort pour nous plonger dans des zones inconnues où tout reste à découvrir et à inventer. Réveillez le téméraire qui est en vous et partez à la conquête de vos impossibles !
10 LEçONS sur
L'impossible est une creation
ANTONI GAUDI
La Sagrada Familia
Imaginer, à la fin du XIXème siècle, un temple expiatoire gigantesque comme une cathédrale gothique dans un quartier populaire et éloigné (à l’époque) du centre de la ville de Barcelone était une gageure incroyable. Commencée en 1882, la Sagrada Familia devrait être terminée en 2026, année du centenaire de la mort du génial architecte catalan.
« L’originalité c’est le retour aux origines »
L’impossible réalisé
Gaudi a été très touché par la nature de sa région natale. Enfant et adolescent il passa beaucoup de temps à observer la flore et la faune de Catalogne, une maladie l’empêchant de jouer avec les autres enfants. C’est dans cette contemplation de la nature qu’il a été puiser son inspiration d’architecte pour concevoir, dans son style Moderniste propre à la Barcelone des années 1880-1900, des immeubles uniques au monde comme la Casa Battlo, la Pedrera et la célèbre Façade de la Nativité de la Sagrada Familia. Il disait : « j’ai toujours copié dans le grand livre ouvert de la nature ». L’impossibilité du projet de la Sagrada tient à son ampleur au regard des très faibles moyens financiers, humains et techniques mis à la disposition de l’architecte. La preuve : Si elle est terminée comme prévu en 2026, la construction de la Sagrada Familia aura duré 144 ans.
ROSS LOVEGROVE
« Captain Organic »
Ross Lovegrove est l’un des designers industriels les plus influents des dernières décennies. Ce Gallois, passionné par l’avenir plus que par le présent, développe une esthétique visionnaire dans laquelle la logique et la beauté de la nature trouvent une place particulière. Il a travaillé pour de nombreuses entreprises prestigieuses, dont Airbus, Apple (sur l’IMac), Japan Airlines, Olympia, Peugeot, Canon, etc.
« Mon point de départ est toujours l’impossible »
L’impossible réalisé
En tant que designer et créateur visionnaire, Ross Lovegrove n’aime pas les raccourcis en matière de créativité. A ses clients qui sont (presque) toujours (très) pressés et qui font des choix créatifs anticipés, il répète qu’il ne faut pas arrêter le processus créatif trop tôt : « Let it flow ! » dit-il, laissez aller, laissez voguer, laissez les idées faire leur propre chemin avant de décider. « Osez imaginer l’impossible ! ». Aux dirigeants de Ti Nant qui lui demandaient de concevoir une nouvelle bouteille pour leur eau de source, il demanda : « Seriez-vous intéressés par une bouteille dans laquelle le consommateur verrait couler la source de Ti Nant ?». Toujours l’impossible comme point de départ ; de là les idées les plus folles peuvent commencer à prendre vie.
MUHAMMAD YUNUS
Un monde sans pauvreté
S’il est bien une fatalité partagée par le plus grand nombre sur terre c’est que le problème de la pauvreté est insoluble ; elle a toujours existé, elle est encore chronique aujourd’hui – une grande part de la population mondiale vit avec moins de deux dollars par jour – et rien ne laisse croire qu’un jour on trouvera une solution miracle. C’est contre ce fatalisme confortable et honteux que l’économiste et entrepreneur bangladais s’est levé. Il a eu l’audace de réfléchir à une solution qui va à l’encontre de tous les grands programmes gouvernementaux, inter-gouvernementaux, onusiens, etc. qui prétendent réduire la pauvreté. Au lieu de confier le problème aux experts, au lieu de mettre sur pied d’immenses chantiers à long terme, au lieu d’avoir une approche occidentale et technocratique des manières de penser et d’agir, il imagina mettre le problème dans la main des pauvres, là où ils sont, avec les ressources et les besoins quotidiens qu’ils ont : le micro-crédit. Ce qui manque le plus aux pauvres du monde entier, c’est la possibilité de prendre leur destin en main et de créer eux-mêmes de la richesse. Au lieu de confier 10.000.000 de dollars à un gros investisseur, il est plus efficace en termes de lutte contre la pauvreté de prêter 100 dollars à 100.000 entrepreneurs locaux, artisans ou familles, afin qu’ils lancent leur activité. Pour réaliser sa vision révolutionnaire, Muhammad Yunus a créé la Grameen Bank, la première institution de microcrédit de l’histoire. Aujourd’hui des millions de personnes ont bénéficié de micro-prêts. En 2006, le Prix Nobel de la Paix fut remis à Yunus.
« Je crois en un monde sans pauvreté »
L’impossible réalisé
Le mode de fonctionnement des grandes banques rendait l’idée de microcrédit impossible, absurde, irréalisable. Les institutions financières recherchent de grands clients – « les grands comptes », à grande profitabilité et offrant une solvabilité maximale. On ne prête qu’aux riches et aux puissants. Yunus a compris qu’il fallait inventer une nouvelle équation financière et aussi comprendre que les pauvres remboursent leurs emprunts, d’autant plus qu’une très large majorité des micro-emprunteurs sont des micro-emprunteuses. Yunus a su voir le problème radicalement autrement et apporter un élément de solution à un problème qui demande encore de nombreuses idées géniales avant d’être éradiqué.
BERTRAND PICCARD
Le Solar Impulse
Bertrand Piccard fait partie d’une fabuleuse lignée de « savanturiers », ces aventuriers de la science sans lesquels il n’y aurait pas de progrès et d’innovations radicales. Son grand-père Auguste fut le premier homme à aller dans la stratosphère, son père Jacques visita en primeur les plus grandes profondeurs, dont la fosse des Mariannes, et lui-même fut le premier homme à réaliser le tour du monde en ballon en une seule étape. Après cet exploit réalisé en 1999, il se lança quatre ans après avec son ami André Borschberg, dans un projet fou : inventer l’avion solaire de demain. Son idée était d’explorer les potentialités de l’énergie solaire de manière radicale et pragmatique : est-il possible de créer un aéronef libre de toute matière fossile ? Pouvons-nous imaginer un avion qui ne consomme aucune goutte des près de 100.000 litres de kérosène nécessaires aujourd’hui pour faire un Paris-New York ? Avec SOLAR IMPULSE II, un premier tour du monde à l’énergie solaire a été réalisé entre mars 2015 et juillet 2016. Un véritable exploit, mais qui n’est qu’une première étape dans un projet incroyable qui invite à inventer les technologies de demain. Le chemin à parcourir est probablement celui qui séparait les frères Wright à l’alunissage d’Apollo XI.
« Nous devenons la plupart du temps prisonniers non pas des vents de la vie, mais de notre propre façon de penser et de comprendre l’existence »
L’impossible réalisé
Bertrand Piccard, médecin psychiatre de formation, explique bien dans son livre « Changer d’altitude : quelques solutions pour mieux vivre sa vie » pourquoi son projet était impossible : « Comme aucun spécialiste aéronautique n’acceptait de construire notre avion, nous avons dû constituer notre propre équipe et sous-traiter les grosses pièces en fibres de carbone à un chantier naval. Là, au moins, personne ne savait que la tâche était impossible ! Les ingénieurs et techniciens, sous la houlette d’André, ont commencé par concevoir, dessiner et construire un premier prototype. Pendant ce temps, je parcourais le monde pour trouver les partenaires financiers et créer les contacts politiques et médiatiques nécessaires ».
BOYAN SLAT
Clean up the ocean
Imaginez un gamin de dix-sept ans qui découvre la pollution des océans par les sacs et bouteilles en plastique. Imaginez-le considérer l’importance « continentale » de cette catastrophe écologique : si l’on agglomérait tous ces déchets, cet amas aurait la taille d’un continent. Imaginez-le, du haut de ces dix-sept ans, se dire : « Je vais résoudre ce problème. Pas demain, pas quand je serai adulte : maintenant ! ». C’est l’histoire d’un jeune Néerlandais particulièrement audacieux, créatif et opiniâtre : Boyan Slat.
« La vie est la plus grande création que la planète a connue. J’aime nager dans la vie, pas dans le plastique »
L’impossible réalisé
L’idée même de débarrasser les océans de leurs millions de tonnes de plastique fleure l’utopie pour les politiques, les industriels et même les écologistes. S’attaquer à la montagne qui a envahi les océans – les experts parlent de 8 à 10 millions de tonnes par an, c’est-à-dire plus d’une benne à ordure toutes les minutes ! – semblait avant le rêve de Boyan Slat totalement irréaliste. L’absence de volonté politique, d’investissements publics ou privés significatifs, le manque de vision, d’idées originales et d’engagement faisait que l’insupportable fatalité dominait. L’idée géniale du jeune étudiant en aéronautique est de développer un système passif et fonctionnant à l’énergie solaire : par la création de barrages géants qui récupèrent grâce aux courants marins les sachets, bouteilles et autres déchets plastiques flottants de la surface à trois mètres de profondeur, et les évacuent en vue d’un recyclage. Un prototype géant est déjà à l’œuvre au Japon : le barrage flottant mesure deux kilomètres de long. Si l’on suit son idée – qui est un véritable projet révolutionnaire à vocation humanitaire – on pourrait récolter plus de 50% du plastique des océans en moins de dix ans à un coût qui devrait être couvert par les revenus tirés du plastique recyclé.
P.S. : Quand il lança son projet, il disposait de 200,- euros et une seule entreprise sur les deux cents sollicitées montra de l’intérêt.